Université Paris-Sorbonne(Paris-IV) Agence Nationale de la Recherche
Le projet « La Dispute » se situe dans le cadre de l’axe thématique 3 : « place de la création dans les systèmes de représentations collectives et d’échanges sociaux ». En un temps où l’idée du « plaire et instruire » domine, les reconfigurations dans les différents domaines de la connaissance sont perceptibles à partir des modifications dans l’écriture des savoirs. C’est donc l’interaction de la création, des savoirs et des pratiques lettrées comme moteur de la création que notre projet propose d’approcher, en faisant l’hypothèse que l’émergence de nouveaux genres et de nouvelles formes rhétoriques à partir de formes plus anciennes procède des confrontations renouvelées dans la mise en discours des connaissances et leurs représentations, en un temps où les domaines disciplinaires sont loin d’être séparés de façon étanche. Par l’étude des différentes formes de disputes et la façon dont elles participent de ces processus, nous nous proposons d’explorer l’univers des relations intellectuelles, institutionnelles, politiques et artistiques qui irriguent les phénomènes de création. Penser la création à partir du concept de dispute implique de l’analyser sous l’angle des pratiques rhétoriques, d’envisager celles-ci sous l’espèce des rapports de force, des relations entre individus au sein de l’espace dans lequel elles se déploient, et de considérer les acteurs de la création comme les publics qui la reçoivent.
Il n'existe à ce jour aucune étude d'ensemble des phénomènes de dispute à l'époque moderne. Si l'on peut formuler certaines hypothèses sur les dispositifs qui président au développement des disputes, à partir de quelques exemples bien étudiés, ces hypothèses demandent à être élaborées de façon plus systématique. Il est indispensable pour cela de procéder à un vaste travail de collecte de données, de rassemblement des textes, de repérage dans les différents domaines de la création, dans le but de traquer les modes de la dispute, d’analyser la nature des querelles et de comprendre la constitution des « cas », qui articulent le général au singulier. Cette enquête empirique d'envergure doit être organisée, systématisée, et surtout mise à disposition du public afin que la communauté puisse bénéficier de ce travail. C’est l’objectif de la banque de données. On verra se dessiner des lignes de force, des dispositifs spécifiques à la dispute et à la constitution de la création comme catégorie opératoire dans la période étudiée. Les publications scientifiques s'appuieront sur cette banque. Le travail d'interprétation des disputes que nous proposons dépasse le cadre traditionnel des travaux universitaires, pour forger des outils d'analyse et de réflexion originaux. Il s'agit en particulier de proposer des actions théâtrales qui permettent de réfléchir aux ressorts des disputes. La logique de la création dramatique possède des dynamiques et exigences propres qui mettent en lumière des dimensions que l'analyse historique et rhétorique ne perçoit pas toujours comme essentielles. Cette dimension théâtrale permet de donner à ce travail une visibilité originale et de proposer aux chercheurs des nouveaux modes d'analyse.